Le 23 août 2013.
Monsieur,
Je n'ai pas pour habitude d'être agréablement surprise par mes contemporains, encore plus rarement lorsqu'ils font partie de ce monde, fort étranger au mien, que l'on appelle assez laidement mais, hélas, avec lucidité le show business.
Je crois donc devoir vous faire part de mon étonnement. J'ai remarqué, cet après-midi, une affiche visant à promouvoir votre tournée. Classique par sa facture, vous étiez présenté en buste, elle a attiré mon attention par sa rare sincérité. Vous aurez bientôt 65 ans et vous arborez sur ce portrait le visage parcheminé de l'homme que vous êtes. Ces rides que la vie vous a dessinées sur les joues, vous ne les les cachez pas sous une épaisse couche de fard ou, plus lâchement encore, en intimant anxieusement l'ordre de les effacer par la triste magie d'un logiciel.
Vous avez votre âge, simplement. Vos années sont là, que vous regardiez en arrière ou vers l'horizon, et vous n'avez pas peur. Cette image de vous est fidèle et belle de l'histoire toujours en devenir que vous portez assez crânement.
Dans un monde où la moindre aspérité inspire l'effroi, où la fadeur est érigée en perfection pourvu qu'elle fût lisse, où l'on s'ennuie poliment en attendant la mort, elle-même aseptisée, M. Alain Chamfort, je vous remercie jusqu'à terre d'être ostensiblement vieux, insolent, sage et beau.
Bien sincèrement,
M.G.